Août 1, 2025 | Les Premiers Moments

Hormone antimüllérienne (AMH) : quand en faire le dosage et à quoi sert-il ?

Bien connue des femmes infertiles et des couples en parcours de procréation médicalement assistée, l’AMH est généralement scrutée tant par l’équipe médicale que par les patientes. Parfois un peu trop peut-être, comme on va le voir, car son taux ne veut pas tout dire quant aux réelles chances de procréer et de réussite d’une FIV (fécondation in vitro).

Qu’est-ce que l’hormone antimüllérienne (AMH) et quand la mesurer chez la femme ?

L’hormone antimüllérienne est une hormone qui reflète, non pas la fertilité de la femme, mais la réserve ovarienne (ou stock d’ovocytes), c’est-à-dire de la quantité potentielle d’ovules qu’une femme peut espérer avoir dans sa vie. On mesure son taux par une prise de sang, remboursée sur prescription médicale.

Le dosage de l’AMH est généralement réalisé lors d’un bilan hormonal s’inscrivant dans un parcours de procréation assistée, ou, un peu avant, lors de la suspicion d’une infertilité. « Son dosage est nécessaire lorsqu’il y a nécessité d’une stimulation hormonale, afin de donner une idée des doses d’hormones qu’il va falloir apporter pour stimuler les ovaires », indique le Dr Benguigui, gynécologue-obstétricien. Car la réponse des ovaires à la stimulation diffère selon le taux d’AMH : un taux faible pourra nécessiter des doses hormonales plus élevées qu’un taux d’AMH plus élevé.

Un rôle majeur dès la vie embryonnaire

L’AMH n’est pas uniquement présente chez la femme adulte. Elle joue un rôle clé dans la différenciation sexuelle, laquelle a lieu dès la vie embryonnaire, in utero.

Lors du développement embryonnaire, c’est l’absence de cette hormone chez le fœtus de sexe féminin (XX) qui va engendrer la disparition des canaux de Wolff et le maintien des canaux de Müller, structures embryonnaires qui aboutiront ensuite à la formation des trompes de Fallope, de l’utérus et de la partie supérieure du vagin.

Chez le fœtus mâle (XY), l’hormone antimüllérienne est sécrétée in utero par les cellules de Sertoli (cellules de soutien présentes dans les testicules) et permet la régression et disparition des canaux Müller, et le maintien des canaux de Wolff, qui aboutiront aux canaux déférents (qui transportent le sperme des testicules à l’urètre).

Plus tard, après la naissance, chez les bébés de sexe féminin, l’AMH est sécrétée par des cellules contenues dans les follicules ovariens, qui hébergent les futurs ovules.

Un indicateur de la réserve ovarienne, rien de plus

« L’AMH est sécrétée par les cellules de la granulosa (la couche de cellules entourant l’ovocyte et la cavité liquidienne du follicule ovarien, N.D.L.R.) des follicules pré-antraux, contenant un ovocyte en phase de maturation », détaille le Dr Benguigui. Car les follicules passent par différentes étapes jusqu’à libérer un ovocyte (qui devient ovule une fois expulsé de l’ovaire) : il y a d’abord le follicule primordial, contenant un ovocyte immature ; le follicule primaire ; le follicule secondaire ou pré-antral (celui qui nous intéresse ici), le follicule antral ou mature. À chaque cycle, un follicule antral est « choisi » en vue de l’ovulation, et devient le follicule De Graff, qui va libérer son ovocyte mature. Ici, ce sont certaines cellules des follicules antraux qui sécrètent l’AMH, ce qui donne donc une indication quant au nombre de follicules antraux présents dans les ovaires.

« Pour faire simple, c’est l’hormone sécrétée par les follicules qui constituent la réserve ovarienne », explique le Dr Benguigui. Ça n’est donc pas du tout un reflet de la qualité ovocytaire, mais simplement un reflet de la quantité d’ovocytes en présence. « C’est-à-dire qu’il n’existe actuellement pas d’hormone reflet de la qualité des ovules, il n’existe pas d’hormone de fertilité », insiste le spécialiste. « On peut avoir une faible réserve ovarienne, un taux d’AMH faible, mais être très fertile », rassure le Dr Benguigui, précisant toutefois que ceci est d’autant plus vrai chez une femme jeune. A contrario, chez une femme de plus de 40 ans, une AMH faible sera une donnée plus défavorable. Pour autant, il ne faut pas prendre la valeur de l’AMH pour un indicateur de fertilité, car c’est heureusement plus complexe que cela. Une femme de 40 ans ayant une AMH élevée ne sera pas forcément hyperfertile et sûre de tomber rapidement enceinte, car la qualité des ovocytes diminue avec l’âge. Le Dr Benguigui a pour usage de dire aux patientes qu’AMH faible, âge « avancé » (passé 37 ans), endométriose ou autre trouble de la fertilité sont comme des feux orange : lorsqu’il n’y a qu’un feu orange, la prise en charge en vue d’une grossesse sera potentiellement plus facile que lorsque plusieurs feux orange sont en présence. Ce qui ne veut pas dire non plus qu’il sera impossible de mener à bien une grossesse. « Parmi les femmes qui accouchent, il y en a sans doute beaucoup qui ont une AMH faible mais ne le savent pas », souligne le Dr Benguigui. Autant de patientes qui sont parvenues à avoir un enfant naturellement en dépit de cette AMH faible.

Une indication en vue d’une PMA

Le taux d’AMH est donc à interpréter avec prudence, c’est d’ailleurs pourquoi il n’est pas conseillé de faire une prise de sang pour mesurer l’AMH sans avis médical. Cette valeur est surtout utile et comprise par le corps médical, qui saura qu’en faire au moment venu, notamment lorsqu’une procréation médicalement assistée est envisagée. Car cela peut donner une indication quant à la manière dont les ovaires vont répondre aux traitements hormonaux, et aider le médecin à choisir les bons dosages pour une réponse suffisante tout en évitant un syndrome d’hyperstimulation ovarienne.

Normal, en cas de SOPK, pour une FIV, à 30 ans, à 40 ans : quel taux d’AMH doit rassurer ou inquiéter ?

Nous ne donnerons pas ici de valeurs précises et détaillées de l’AMH, car mieux vaut voir directement avec son médecin prescripteur pour une interprétation sûre. Disons simplement qu’un taux d’AMH peut être considéré comme normal lorsque compris entre 2 et 5 ng/ml (pour une femme de moins de 35-37 ans), avec des variations selon l’âge, puisque le taux d’AMH a plutôt tendance à diminuer avec les années.

Notons que s’il peut être rassurant, un taux élevé d’AMH peut aussi être associé à un syndrome des ovaires polykystiques, puisque ce dernier se traduit par une accumulation de follicules pré-antraux ou antraux dans l’ovaire, donc d’autant plus d’AMH sécrétée. Rappelons que le SOPK se manifeste aussi par des troubles d’ovulation, parfois associés à une hyperpilosité, de l’acné, des troubles métaboliques (diabète), un surpoids ou une obésité.